mercredi 21 mai 2014

Pourquoi les parents postent plein de photos puis plus rien

F&O Forgotten Nobility

Un enfant, pendant ses premières années, c'est fort docile.

Ca se laisse photographier sous toutes les coutures, ça devient le sujet sans fin de conversations où il apparait tantôt comme un génie, tantôt comme un dictateur ou bien comme un amour de trésor digne rejeton de ses illustres, forcément illustres parents.
Ca se laisse habiller, pouponner, ça vit dans une chambre décorée avec amour, ça mange bio sans s'en rendre compte, ça fait des bons mots à tire larigot, des spectacles déguisés, des dessins so chou.
Ca crée du lead, du link et du like, c'est tellement satisfaisant.

Soupir.
Une source inépuisable de satisfactions que l'on offre au regard envieux, forcément envieux de son entourage ébahi par tant de réussite.

(la suite après le saut)



Et puis un jour, ce petit être que l'on ne voulait voir que délicieux découvre ce que l'on fait de sa vie et ose s'en émouvoir. Conspue les déclarations enamourées ou à peine gentiment, toujours gentiment ironiques de ses géniteurs.
S'oppose farouchement à tout publication de ses exploits sur les réseaux sociaux parentaux alors que lui, comble de l'injustice, s'y répand sans filtre et semble-t-il sans arrêt.
Déclare son indépendance en claquant violemment la porte de sa chambre et de son portable désormais bardé de codes.

Boude, exige un droit de regard sur la diffusion de ses faits et gestes, et même sur l'affichage dans le salon du portrait familial sur lequel il figure, sous prétexte que notre regard n'est pas bon juge de photogénie puisque "de toute façon les parents ne sont pas objectifs, sinon tu verrais bien que je suis immmooooonde sur cette photo".

Ne quitte pas ses portables des yeux ni ses oreilles hors de son casque king size mais développe une oreille bionique pour tout ce qui le concerne.

La fierté ainsi rendue muette, le parent se retrouve le bec dans l'eau, comme amputé de sa share of voice de leader d'opinion,  et tente péniblement de conserver son empreinte numérique à coups de  selfies de copains tout autant délaissés et de clichés en famille où ne figurent plus que de dos des enfants moqueurs.

Et le soir, regarde toujours d'un regard enamouré son trésor d'enfant dont il ne peut plus se vanter.


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